man on the moon poster.jpgL’INTRIGUE

La carrière du comique américain Andy Kaufman, mort en 1984 d’un cancer du poumon. Né à New York en 1949, il débute dans de nombreux cabarets avant de se faire remarquer à la télévision dans la célèbre émission Saturday Night Live. Il est une des vedettes de la série Taxi puis provoque les réactions les plus diverses en montant des spectacles originaux, notamment au Carnegie Hall de New York…

Etats-Unis – 1999
avec Jim Carrey, Danny DeVito, Courtney Love
Nouveau master haute définition


The Show must go on

Le 13 avril dernier, le réalisateur Milos Forman s’envola loin au-dessus de son nid de coucous pour inscrire une nouvelle étoile au firmament des cinéastes. Cette disparition du réalisateur d’Amadeus et de Larry Flint ajoute encore plus à l’émotion de revoir aujourd’hui en Blu-ray son Man on the Moon, biopic pas comme les autres sur ce comique pas comme les autres qu’était Andy Kaufman. Comme le souligne parfaitement Jacky Goldberg dans les bonus, cette trilogie formée par les figures de Mozart, Flint et Kaufman travaille et questionne ce principe du show business. « Show + business. Pas de show sans business », ainsi que l’explique le personnage de Danny DeVito dans ce troisième volet. Telle est la dichotomie inhérente, et particulièrement à Hollywood, que doivent affronter constamment les artistes. Ces derniers qui voient souvent dans la mort une injuste rétribution à leur talent, vis-à-vis d’une possible reconnaissance posthume.

Déjà à sa sortie, Man on the Moon tranchait par son approche à contre-courant des attentes simples du public américain, coutumier des frasques télévisuelles d’Andy Kaufman. Si Jim Carrey explosa avec les héros cartoonesques de The Mask et Ace Ventura, rien dans son incarnation de Kaufman ne relevait de la pantalonnade humoristique. Bien au contraire. Le documentaire de Chris Smith Jim & Andy : The Great Beyond démontre parfaitement l’abandon, sans aucun garde-fou, de l’acteur dans son personnage. Même en dehors des plateaux, Jim Carrey était Andy Kaufman et/ou son alter ego maléfique, l’excentrique et grossier Tony Clifton. Il ne transparaît pas à l’écran du tournage chaotique qui découla de cet effacement de la frontière délimitant la fiction et la réalité de cette (ré)incarnation. Pourtant, la vie n’est-elle finalement qu’une succession de rôles que nous tenons selon chaque situation ?

Man on the Moon

C’est dont il est question dans Man on the Moon, ce qu’Andy Kaufman explorait à l’époque en remettant en cause le dispositif de chacun de ses spectacles et de toujours surprendre son public avec de l’inattendu. Et ce quitte à prendre au dépourvu ses propres collaborateurs, afin de garder toujours une longueur d’avance. Tout pouvait être une grosse blague, même la dernière. Avec The Truman Show de Peter Weir, sorti un an auparavant, Jim Carrey se dévoilait enfin. Il n’était plus seulement ce visage grimaçant perché sur un corps dégingandé. Coup sur coup, l’acteur devenait touchant, émouvant. Ses personnages complexes révélaient les coulisses pas forcément reluisantes de la magie hollywoodienne, en provoquant ce public qui végète derrière son écran, à la merci des annonceurs. Il s’agit d’ailleurs du sujet d’un dialogue de sourds entre Andy Kaufman et l’un des patrons de la chaîne ABC interprété par Vincent Schiavelli.

Man on the Moon 2Tout comme Jim Carrey, Andy Kaufman s’est confronté à ce manque de recherche de volonté du public. La plupart ne demandent que ce qu’ils connaissent déjà par cœur des artistes qu’ils viennent applaudir. Le succès d’un numéro débouche dans une case à répondre à chaque spectacle : Kaufman obligé de reprendre inexorablement ses personnages de l’étranger d’Europe de l’Est ou de Latka de la sitcom Taxi pour satisfaire les masses ingrates. Le point d’orgue du long-métrage a encore plus d’impact depuis la mort de Milos Forman. Lui, qui avait permis à la magie de perdurer en laissant une porte ouverte au destin funeste de Kaufman, posait comme l’humoriste à ses funérailles la question de la survivance par l’image. Le cinéma permet de retranscrire l’illusion d’un mouvement du passé. Et si Man on the Moon soufflera sa vingtième bougie l’an prochain, nous admirerons encore longtemps sa vibrante lumière, comme celle d’une étoile lointaine partie décrocher la lune.


L’édition Blu-ray de Man on the Moon est proposée avec de deux entretiens autour de Jim Carrey par Jacques Demange (23′) et Andy Kaufman décrypté par Jacky Goldberg (26′), ainsi qu’un long documentaire exclusif intitulé « Andy Kaufman : le funambule du rêve américain » (52′).

SORTIE LE 24 AVRIL CHEZ ESC éditions.

man-on-the-moon-brd


3 commentaires

Hair, de Milos Forman (1979) – Revus & Corrigés · 19 juillet 2018 à 14 h 59 min

[…] Jim Carrey) : le trublion génial auquel Forman consacre un biopic brillant et inventif en 1999 : Man on the Moon. Et comment ne pas voir dans le dernier long-métrage de Forman, Les Fantômes de Goya (2007) […]

Hair, de Milos Forman (1979) · 19 novembre 2020 à 17 h 09 min

[…] Jim Carrey) : le trublion génial auquel Forman consacre un biopic brillant et inventif en 1999 : Man on the Moon. Et comment ne pas voir dans le dernier long-métrage de Forman, Les Fantômes de Goya (2007) […]

Une histoire de cinéma – Milos Forman, l’exilé · 11 janvier 2021 à 17 h 02 min

[…] « The show must go on : Man on the Moon (1999) » […]

Les commentaires sont fermés.

En savoir plus sur Revus & Corrigés

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading