Cold Sweat, aussi connu sous son titre français de De la Part des Copains, est le quinzième film de la collection Make My Day ! de Jean-Baptiste Thoret. Réalisé par Terence Young – cinéaste britannique connu pour ses thrillers d’espionnage –, Cold Sweat est un pur produit tel que savait les mettre en scène le réalisateur.
Propulsé sur la scène internationale par les succès de ses trois James Bond avec Sean Connery, James Bond contre Dr. No – qui inaugure la franchise en 1962 –, Bons Baisers de Russie (1963), Opération Tonnerre (1965), Terence Young a une réputation de faiseur. Bon technicien, il emballe des films efficaces de tous genres (Mayerling, La Fantastique Histoire vraie d’Eddie Chapman…) et se fait le chantre de coproduction européennes prestigieuses, réunissant des stars internationales. Mais Young est capable de tourner des films plus ambitieux à l’image de Seule dans la Nuit (1967), petit thriller épatant avec Audrey Hepburn en jeune femme aveugle aux prises avec des gangsters trafiquants de drogue. Cold Sweat est la transposition cinématographique de Ride The Nightmare, roman noir de Richard Matheson; déjà adapté à l’écran par l’écrivain en personne, pour la série télévisée Alfred Hitchcock Présente. Robert Dorfmann est à la production, tandis que Shimon Wincelberg, Dorothea Bennett, Albert Simonin en signent le scénario, et Michel Magne la musique. Cold Sweat est la première collaboration entre Terence Young et Charles Bronson. Deux autres suivront, plus « racées » : Soleil Rouge (1971), Alain Delon, Toshirô Mifune et Ursula Andress, et Cosa Nostra (1972), avec Lino Ventura.
On imagine ce qui a pu intéresser Jean-Baptiste Thoret dans Cold Sweat. Lors de sa présentation du film, le critique de cinéma reconnaît préférer la période européenne de la carrière de Charles Bronson. Il est vrai que l’acteur enchaîna à cette époque une série de films passionnants : La Bataille de San Sebastian (1968) d’Henri Verneuil, Il était une fois dans l’Ouest (1968) le chef-d’œuvre de Sergio Leone, Le Passager de la Pluie (1969) du grand René Clément, La Cité de la Violence (1970) polar italien important de Sergio Sollima. Pour autant, Cold Sweat n’a pas la force de ces longs-métrages. Tourné à Villefranche-sur-Mer et aux Studios de la Victorine à Nice, le film replace une intrigue de roman noir américain sur la côté d’Azur. L’histoire plonge un vétéran de la guerre de Corée, Joe Martin, dans un scénario classique de film noir. Taciturne, taiseux (Bronson oblige), l’homme voit ressurgir dans sa vie rangée, un passé dont il ne veut plus.
Incarné par James Mason en vieux gangster, Michel Constantin (dans un rôle bref), Liv Ullman (la muse de Bergman joue les utilités), Jill Ireland (la femme de Bronson, qui n’a rien à faire à part être un clone de Sharon Tate), et Jean Topart (qui vole la vedette à tout le monde, dans le rôle d’un fieffé salopard), Cold Sweat est un petit film, produit pour exploiter la notoriété de Charles Bronson. Surtout, il fait partie des petits plaisirs coupables qui parsèment la vie d’un cinéphile. D’abord, à cause de (ou grâce à) la présence de Charles Bronson. Comme le romancier et cinéaste Philippe Setbon (auteur de la seule biographie française consacrée à l’acteur du Justicier dans la ville) le dit, dans un supplément passionnant, Charles Bronson n’est jamais meilleur que lorsqu’il ne joue pas. Dans Cold Sweat, l’acteur n’a pas de vraiment de personnage. Il lui suffit d’apparaître en tee-shirt noir, affichant une musculature impressionnante, des bras aux veines atrophiées, pour aussitôt devenir iconique. Ceci, Terence Young l’a bien compris. Son film est un « véhicule » pour Bronson, avec comme mission de le filmer sous toutes les coutures, dans toutes les situations – sauf érotiques. En action, se bagarrant en corps-à-corps, assis, au repos. Et même au sol, fracassé ! Young exploite au maximum la plastique, le corps de Bronson, et filme remarquablement bien le visage buriné, les regards du comédien américain aux origines lituaniennes.
Si Cold Sweat demeure un souvenir inaltérable pour beaucoup de cinéphiles, le film le doit à sa poursuite de voitures (réglée par Rémi Julienne) d’une durée de dix minutes. Voilà le morceau de bravoure qui impressionne encore près de cinquante ans après sa réalisation ! Cold Sweat fut aussi diffusé de nombreuses fois à la télévision française, marquant l’imaginaire de nombreux jeunes téléspectateurs. Loin d’être une pierre angulaire des cinémas d’action et policier, et même de la filmographie de Bronson (qui fera pourtant bien pire), il n’en reste pas moins une véritable Madeleine cinématographique.
Studiocanal
Combo DVD / Blu-ray
28 août 2019
Cold Sweat (De la part des copains)
Un film de Terence Young
Avec Charles Bronson, Liv Ullmann, James Mason, Jill Ireland
1970 – France / Italie / Belgique
Cold Sweat est édité dans la collection « Make my Day » de Jean-Baptiste Thoret. En complément, la traditionnelle préface de Thoret (8 min), un module « Cold Sweat vu par Philippe Setbon », un entretien Michel Constantin de 1975 pour l’émission Cinéscope (52 min.), et la bande-annonce originale.