AU SOMMAIRE DU N°3

Printemps 2019

edito-3

L'Édito :

Europa Universalis

Le 6 novembre 2016, la version restaurée par Kevin Brownlow de Napoléon vu par Abel Gance (1927) fut projetée au Royal Festival Hall de Londres. Quel événement ! Remplir une salle de près de trois mille places, avec un film muet de cinq heures et demie – avec accompagnement symphonique. Mais surtout, il s’est passé là quelque chose d’important, lors d’une scène précise. Le film de Gance n’aborde qu’une partie de la vie de Napoléon, de ses débuts à l’école militaire de Brienne à la campagne d’Italie – cinq autres volets auraient dû compléter la saga à venir. Et justement, avant le début de cette campagne, une séquence voit le général Bonaparte, pensif, se rendre à la Convention pour y méditer. Les fantômes de la Révolution, Danton, Marat, Robespierre, Saint-Just et d’autres, apparaissent et le confrontent. « Si la révolution ne s’étend pas au dehors de nos frontières, elle mourra sur place. Veux-tu l’entraîner en Europe ? », s’enquièrent les spectres, avant de demander à l’Empereur en devenir : « Quels sont tes projets, Bonaparte ? ». Napoléon, alors comme possédé, interprété par le sublime Albert Dieudonné, se lance alors dans un monologue inédit. « La libération des peuples asservis, la fusion des grands intérêts européens, la suppression des frontières… et la République universelle », scande-t-il, avant de compléter : « L’Europe ne devra faire bientôt véritablement qu’un même peuple, et chacun en voyageant partout se trouvera toujours dans sa patrie commune. » Au milieu de la projection, alors que l’orchestre jouait toujours et que la séquence se poursuivait, l’immense salle applaudit spontanément, comme en liesse. Après tout, nous n’étions que cinq mois après le vote du Brexit – auquel Londres s’était opposé. Mais tout de même ! Quelle idée, quelle vue unique de voir des Anglais applaudir Napoléon et ses perspectives européennes. Voilà le pouvoir du cinéma, lui qui ne peut plus changer le monde. Mais peut-il encore, peut-être, changer l’Europe ?
Les photogrammes ci-dessus ont été reproduits avec l’aimable autorisation de La Cinémathèque française. NAPOLÉON est une restauration de La Cinémathèque française sous la direction de Georges Mourier, que nous remercions chaleureusement.

REVOIR : RÊVER UN CINÉMA EUROPÉEN

• Prologue – À la recherche du cinéma européen

• Balade dans les coproductions des années 1950 à 1970

• Coproductions franco-italiennes : d’Autant-Lara à Antonioni

• Cinecittà ou le rêve de grandeur européenne

• Western, une nouvelle Frontière européenne

• Europudding à l’arsenic

• Une carrière sans frontière – Entretien avec Jean-Jacques Annaud

• Unis dans la diversité : quelle Europe pour le cinéma de coproduction ?

• D’autres regards européens : Theo Angelopoulos, Emir Kusturica, Nuri Bilge Ceylan…

CORRIGER

Les Forbans de la nuit + Entretien avec Philippe Garnier

Et aussi : Nice Girls Don’t Stay for Breakfast, Requiem pour un massacre, La Poursuite implacable, La Meilleure façon de marcher, Mort à Venise, Le Procès de Jeanne d’Arc, Alexandre Nevski et Yvan le Terrible, L’Étrange incident, Ragtime, Miracle en Alabama, Le Train, La Belle

TRAVERSER

• Tour du monde : L’Aiguille (1988), icône de la nouvelle vague kazakhe

• Portrait : Histoires perdues d’Hollywood – Entretien avec
Clara et Julia Kuperberg

• Rendez-vous : Festival Toute la mémoire du monde 2019

– Le pari du patrimoine

– Entretien avec Nicolas Winding Refn

– Entretien avec Jerzy Skolimowski

• Conseils : Livres, théâtre

• Une bouteille à la mer : Le plus beau métier du monde, par Pierre Olivier

Crédits images : Couverture – Illustration originale de Vladimir Thoret © 2019 DR. / Édito – Napoléon © 1925 La Cinémathèque française / Youssef Chahine © MISR Films DR. / Pierre Schoendoerffer sur le tournage de La 317ème section © 1965 Les productions Georges de Beauregard, Paris Rome Films, StudioCanal / Million Dollar baby © 2004 Warner bros. / Miami Vice © 1984 Michael Mann Productions, Universal Television