Critiques
BUSHMAN (1971), je suis un autre
Œuvre critique de tous les préjugés, Bushman marque surtout par son troisième acte, dont le revirement aussi inattendu que dramatique donne finalement au long-métrage ce qu’il lui manquait d’incarnation.
Œuvre critique de tous les préjugés, Bushman marque surtout par son troisième acte, dont le revirement aussi inattendu que dramatique donne finalement au long-métrage ce qu’il lui manquait d’incarnation.
La Victoire en chantant (1976), Coup de tête (1979), La Guerre du feu (1981), c’est à se demander pourquoi Jean-Jacques Annaud, avec sa tête à l’époque remplie d’ours, s’est-il trouvé soudain à transposer le chef-d’œuvre du sémiologue Umberto Eco ? Presque comme à chaque nouvelle pièce maîtresse de sa filmographie, il faut gratter sous le vernis de la pellicule pour comprendre que son apparente intrusion dans l’univers de ce professeur de l’université de Bologne n’a rien d’un hasard. À la manière de son héros Guillaume de Baskerville, le cinéaste incarna malgré lui un trouble-fête idéal, en s’emparant de ce best-seller avec la bénédiction de l’auteur. Il bouscula ainsi d’innombrables dogmes et certitudes, aboutissant à ce long-métrage inoubliable à redécouvrir en version restaurée.
En faisant l’ouverture de la Quinzaine des réalisateurs en 2004 avec son troisième long-métrage, The Taste of Tea, l’iconoclaste cinéaste japonais Katsuhito Ishii vit sa carrière propulsée sur le devant de la scène cinématographique internationale. Il était cette année l’un des invités à l’honneur du 22e NIFFF avec une sélection de ses réalisations en version restaurée, dont son tout premier film, sorti il y a 25 ans, qui lui avait permis de croiser la route d’un certain Quentin Tarantino…
Succédant à la rétrospective « Scream Queer » qui, lors du précédent NIFFF, mettait en avant les représentations LGBTQIA+ dans le cinéma de genre, celle intitulée « Female Trouble » a exploré lors de la 22e édition du festival neuchâtelois de multiples facettes de ces figures féminines souvent bien mal mises en valeur dans les œuvres cinématographiques fantastiques et dont les plus iconiques se sont formées à la marge. Rapide tour d’horizon d’une sélection éclectique de 20 longs-métrages issus de nombreux pays, allant du muet jusqu’en 2022.
La 22e édition du NIFFF du 30 juin au 8 juillet derniers, s’est éclairée par l’invitation de cet auteur de films d’actions américains parmi les plus mémorables tels que Predator, Piège de cristal ou À la poursuite d’Octobre rouge. Lors d’un rendez-vous qui marquait les 20 ans depuis le tournage de son dernier film, John McTiernan est revenu en artiste engagé, sans fard et sans filtre, sur sa carrière gravie jusqu’aux plus hauts sommets et sombré dans la disgrâce versatile d’Hollywood.
Grand admirateur de Paul Grimault et d’Hayao Miyazaki, cet artiste mérite pleinement sa place à leurs côtés. Malgré la modestie des moyens à sa disposition, René Laloux fut l’un des plus talentueux défenseurs de l’animation et des possibilités sans limites de l’imaginaire, signant une œuvre non conformiste où résonnent les noms mythiques de Topor, Mœbius et Caza, et dont la version restaurée de son deuxième long-métrage, Les Maîtres du temps (1981), est présentée cette année au Festival d’Annecy.
Malgré le succès relatif des Femmes naissent deux fois, Yuzo Kawashima rempile dès l’année suivante auprès de la Daiei en plongeant l’hypnotique Ayako Wakao au cœur d’un triangle amoureux pervers dans Le Temple des oies sauvages. Le cinéaste japonais distille des éléments plus personnels dans sa description atemporelle de son pays avec un film aussi sublime à l’image qu’il en est transgressif dans le miroir qu’il tend aux institutions traditionnelles de l’archipel nippon. À redécouvrir dans une copie magnifiquement restaurée
En ce mois de mars 2023, l’éditeur Badlands ajoute à la collection 1kult trois opus de Yuzo Kawashima, prolifique cinéaste japonais et pourtant moins connu par chez nous que certains de ses pairs. Un cadeau triple en versions restaurées qui commence avec Les Femmes naissent deux fois, critique incisive de la société patriarcale japonaise en déconstruisant ses mythes, avec une Ayako Wakao sublime et insaisissable en prostituée en quête d’indépendance.
Quand Keanu Reeves et Christopher Kenneally sortent en 2012 Side by Side, leur documentaire sur l’essor du numérique, leur but est d’aller voir les grands noms du cinéma – de Martin Scorsese à George Lucas – pour raconter cette révolution. Et constater la raréfaction de la pellicule au sein du cinéma américain. 10 ans plus tard, ils reprennent avec nous la discussion. Où en sont pellicule et numérique à l’aube de 2023 ?
Janvier 1931, aux abords de Martigues, le cadavre d’un manœuvre italien est retrouvé dans un champ. La femme de celui-ci et son amant sont arrêtés et, après avoir chacun déclaré être l’auteur du meurtre, s’accusent mutuellement. Ce sordide fait divers dans le milieu des travailleurs émigrés tiendra en haleine pendant plusieurs semaines les journaux locaux, mais va surtout se révéler être une opportunité inespérée pour Jean Renoir. Une virée au plus près du réel dans une nouvelle restauration et édition Gaumont.
À quel moment une foule qui demande justice dérape et jusqu’où peut-elle aller, abreuvée de fantasmes à s’en assoiffer de sang ? C’est la question que nous pose Arthur Penn avec La Poursuite impitoyable, qui replace un Marlon Brando admirable en ultime rempart de la loi, abandonné au milieu d’une ville hystérique à l’arrivée d’un évadé présumé coupable, incarné par Robert Redford. Un samedi soir sous haute tension aussi fiévreux que glaçant, et qui n’épargne rien… ni personne.
La Jeune fille à l’écho est un premier long-métrage lumineux avec lequel s’affirme la mise en scène poétique d’Arūnas Žebriūnas. Ce grand auteur d’un cinéma lituanien encore mal connu signe sans prétention un véritable petit bijou d’une splendeur incontestable et sachant faire appel à notre cœur d’enfant.
Le 20 février 2020, Kirk Douglas tirait sa révérence à 103 ans, un âge tout aussi légendaire que la carrière qu’il s’est forgée sur le grand écran. La première pierre posée à l’édifice de son monument est sans aucun doute Le Champion de Mark Robson édité en DVD et Blu-ray chez Rimini Éditions et dans lequel l’acteur y incarne un boxeur plus vrai que nature. Un rôle qui lui va comme un gant, notamment à cause de son profil d’outsider transcendant un Kirk Douglas qui a connu un début de vie difficile et est parvenu à se hisser hors d’une misère sociale à la seule force des bras.
Bien avant les récentes bandes de super héros sabordées par leurs propres studios, il existait ce savoureux OVNI foutraque qu’est Mystery Men. Le film de Kinka Usher vaut encore et surtout pour l’assemblage improbable et très sympathique qu’il représente à l’écran, retournant le schéma éculé aujourd’hui du héros-concept en mettant en avant l’humain, si dénué de talent soit-il, derrière le costume et parvient, dans un n’importe quoi assumé, à trouver un curieux équilibre entre désir d’anti-système et blagues de prout.
Même au fond du caniveau le plus sordide, la loi existe encore. C’est notamment à la brigade des mœurs qu’incombe ce sale boulot : nettoyer ces rues ténébreuses oubliées à la nuit par la société. Vice Squad nous fait déambuler dans ce Los Angeles des années 1980, une jungle urbaine sombre et brutale dans laquelle cette poignée de flics lutte à la marge avec l’énergie du désespoir. Une pépite du cinéma d’exploitation américain aux accents tristement contemporains suggérée par Jean-Baptiste Thoret dans sa collection Make My Day.
Les sorties conjointes en Blu-ray de La 317ème section, du Crabe-Tambour, de Diên Biên Phú en version restaurée et de La Section Anderson au cinéma au mois de mars 2019 nous font replonger dans l’œuvre testimoniale de ce cinéaste-vétéran, réminiscences d’une quête d’images à jamais perdues.
À l’heure de l’édition 2020 du Paris Images Digital Summit, réunion au sommet des amateurs et professionnels des effets spéciaux, nous avions pu nous entretenir avec l’invité de la précédente, John Knoll, sur la participation de la société Industrial, Light & Magic à la reconstruction du film d’Orson Welles The Other Side of the Wind.
Aussitôt occulté par l’ombre de Star Wars, le deuxième long-métrage de George Lucas mérite que l’on y rejette un coup d’œil. À travers le prisme faussement nostalgique envers la décennie précédente, American Graffiti se révèle surtout par sa reconstitution d’une fin de l’innocence rituelle et révolue, observée depuis cette Amérique traumatisée du début des années 70.
Rarement les images d’archive auront su montrer leur importance qu’en ce jour-là, immortalisant à jamais une planète entière assistant à ces premiers pas sur la Lune. Un demi-siècle s’est écoulé et la preuve est toujours là, incontestable, dans un documentaire inédit réalisé par Todd Douglas Miller.
Il y a 50 ans s’organisait le Festival Panafricain d’Alger, un événement qui invita les artistes du continent à se rencontrer, et notamment ceux issus du cinéma. Mais l’année 1969 fut aussi un tournant pour le cinéma africain sur plusieurs aspects. Nous avons pu rencontrer le cinéaste tunisien Férid Boughedir qui a été témoin de ces bouleversements et dont la version restaurée de son film Caméra d’Afrique a été présentée cette année à Cannes Classics. Le documentaire revient sur les rêves et les espoirs des premiers représentants d’un cinéma africain indépendant en quête d’existence et de reconnaissance.